Secondes de vie
I
La terre reçoit ma caresse quotidienne
le caoutchouc file sur elle comme la mousse
le bitume parfois cicatrice mal
les poussières s'envolent plus loin
à tire de blouson ou de jean's
le caillou sous la godasse
orphelin ou clandestin
ubuesque rayure sur le lino
finit ma journée en soupirant
II
là tout près ce coassement tiède
que la nuit enrubanne et sertit
d'un phare aveuglant
survivra-t-il au vrombissement
III
ce mot qui ne vient pas
sous mon crâne blanchi
dans ma phrase suspendue
comme un pont au-dessus des mâts
ces syllabes qui s'accrochent au réverbère de la pensée
et qui chutent
dans la flaque ou la vase
et mes yeux qui tombent dans ce cloaque
et déjà l'autre qui a changé de sujet
IV
un ballon qui roule comme une planète
sur ma route toute droite
où jaillit la vie
dans ma journée obscurcie
la pensée qui s'enfuit
et si ?
Oui l'enfant est là
joueur insouciant d'une partie éternelle
préau devant l'orage qui gronde dans les cœurs
mon liquide de frein prolonge sa vie
et sans moi il finit sa partie
V
quelque part en moi en elle
en ce moment en cette seconde
peut-être dans mon œil
sans doute dans son cœur
l'enfant à venir nous observe
tapi comme la pépite
dans les fleuves de nos jours
et de chaque mot
lui seul sait chaque virgule